[Miss Curieuse] Peut-on faire confiance à LEVEL, la nouvelle compagnie low cost?

Gwendoline Duval
Spécialiste marketing du tourisme & tendances
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Montréal – 18 juillet 2018

Après seulement deux semaines d’activités à Montréal, la compagnie aérienne Level est déjà en pleine turbulence. Level est supposée relier Montréal à l’aéroport Paris-Orly 3 fois par semaine cet été (lundi, jeudi, samedi) mais n’a pas tenu ses promesses. Coincée à Montréal depuis samedi en raison de l’annulation de plusieurs vols, une partie des 800 passagers affectée par l’incident ignorent toujours quand ils pourront repartir. Face à des informations confuses et contradictoires dans la presse locale, nous avons contacté la compagnie aérienne pour avoir l’heure juste. 

Le récent problème à l’aéroport de Montréal a semé la panique chez les voyageurs qui se demandent s’ils peuvent faire à nouveau confiance à la compagnie aérienne à bas prix. Certains ont même dû annuler leurs vacances d’été en raison de cet incident. Au Québec, les vacances sont beaucoup trop rares pour les sacrifier pour quelques dollars d’économies. Que s’est-il vraiment passé à l’aéroport de Montréal samedi 14 juillet dernier? Comment la compagnie aérienne gère-t-elle la situation? A-t-elle un avenir au Québec? Nous nous sommes entretenus avec le responsable des relations publiques de la compagnie pour comprendre et se faire un avis. Devons-nous donner une seconde chance à cette compagnie low cost qui, deux semaines après son lancement a déjà déçu tant de passagers?

« En date du 18 juillet, tous nos passagers ont bénéficié d’une option de re-protection ou re-routing. Mis à part ceux qui reviennent à l’aéroport au compte-gouttes parce qu’ils préfèrent changer d’option, nous les avons gérés. Les passagers peuvent avoir confiance en notre entreprise. Nous savons faire de l’aérien. LEVEL n’est pas une nouvelle compagnie aérienne. Nous appartenons au groupe IAG qui détient notamment British Airways, Iberia et Vueling dont la réputation n’est plus à faire. L’incident survenu à Montréal est un événement exceptionnel, et qui pour nous, n’est pas acceptable. Nous avons identifié le problème à la source et tout rentrera dans l’ordre rapidement » a expliqué Hugo Trac, en charge des relations publiques chez LEVEL.

Mais cela reste encore à prouver! L’OTC s’en mêle: 

L’OTC a pris connaissance des annulations de vols de LEVEL le week-end dernier qui ont affecté des passagers tentant de quitter l’aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau de Montréal pour l’Europe. L’OTC examine présentement la situation et fera des mises à jour de tout développement sur son site Web.

D’ici là, si les passagers sont incapables de joindre LEVEL ou de résoudre la situation avec eux, les passagers peuvent déposer une plainte avec l’OTC. Il serait bon pour les passagers affectés de savoir que les politiques des transporteurs aériens relatives aux modifications de vols, incluant les annulations, sont énoncées dans leurs tarifs (conditions de transport). Dans ces cas-ci, les vols vendus sous le nom LEVEL étaient exploités par Iberia ou Open Skies et leurs dispositions sur les annulations sont énoncées dans leurs conditions de transport.

Afin de déterminer le tarif en vigueur, les passagers devraient consulter leur itinéraire ou leur billet électronique. Si le code du transporteur est LV (LEVEL/Open Skies) alors le tarif d’Open Skies s’applique. Si le code sur le document est IB (Iberia Airlines) alors le tarif d’Iberia s’applique.

RAPPEL DES FAITS

Le nouveau transporteur aérien à bas prix a fait son apparition dans le ciel de Montréal, lundi 2 juillet 2018. Il doit relier Montréal et l’aéroport Paris-Orly 3 fois par semaine cet été (lundi, jeudi, samedi) jusqu’au 4 novembre. LEVEL a annulé deux de ses rotations hebdomadaires: son vol du 14 juillet et celui du 16 juillet. Comme la compagnie n’assure que 3 vols par semaine, ces annulations ont eu de lourdes conséquences sur les passagers et pourrait coûter très cher à LEVEL autant au niveau de l’image que du porte-monnaie. Les 800 voyageurs qui pensaient s’envoler vers la France pour de belles vacances sont en colère. Certains se demandent même si la compagnie aérienne est sérieuse. Les derniers passagers pourraient s’envoler jeudi d’après Hugo Trac, le relationniste de LEVEL, soit un retard de près d’une semaine.

POURQUOI CES ANNULATIONS SUCCESSIVES ?

LEVEL a déclaré dans un courriel au Journal que les vols ont été annulés en raison de problèmes «opérationnels» or, lors de notre entrevue avec Hugo Trac, nous avons appris qu’il s’agit en réalité d’un problème lié au personnel navigant. LEVEL n’a pas souhaité donner plus de détails sur les motifs de l’incident, pourtant la compagnie affirme ne pas sous-traiter son personnel navigant et disposerait de près de 160 personnes pour voler sur ses avions Boeing et Airbus.

En 3 jours, il aurait été plus simple de faire venir à Montréal un équipage en provenance des quatre coins du monde plutôt que d’annuler deux vols. Cela soulève donc une interrogation réelle sur la compagnie. Autres pistes: certains agents de bord ne seraient apparemment pas formés pour voler sur Boeing et d’autres ne sont pas familiers avec Airbus d’après ce que nous a laissé sous-entendre le relationniste. Le problème pourrait donc venir d’un problème d’adéquation entre le personnel et l’appareil disponible.

QUELLES SONT LES ACTIONS ET MESURES PRISES PAR LEVEL?

Certains passagers affirment ne pas avoir reçu d’assistance alors que la compagnie aérienne dit le contraire. Dans ce genre de situation, la colère prend souvent le dessus et il est certain que les passagers ont fait du bruit et n’ont pas hésité à en faire part à la presse! Vous venez de voir vos vacances tombées à l’eau et un journaliste vient vous demander votre avis sur la situation? Il est fort probable que seulement des choses négatives sortiront de votre bouche. Ce que nous avons constaté, c’est que la compagnie a en tout cas mis en place des actions même si elles ne s’avèrent pas à la hauteur des attentes de certains passagers. Il faut être conscient qu’en faisant affaire avec une compagnie aérienne qui n’assure pas de liaisons quotidiennes, vous prenez un risque si un problème de ce type arrive.

« Nous sommes gênés et peinés pour nos passagers, particulièrement compte tenu de la période des vacances d’été. Nous sommes conscients du préjudice pour nos passagers, c’est pourquoi nous avons rapidement mis en place des options pour leur permettre de rejoindre leur destination le plus vite possible » a déclaré Hugo Trac. 

« Nous sommes en relation permanente avec notre équipe au sol à l’aéroport de Montréal pour suivre et régler la situation. Chaque passager a reçu un document lui présentant les différentes options possibles » précise Hugo Trac.

Option 1: Repositionner les passagers sur le prochain vol de la compagnie.

Dans un modèle d’affaires qui prévoit l’optimisation du remplissage des avions, on peut douter du nombre de places disponibles pour faire partir sur le prochain vol les 800 passagers. Une solution qui n’en est donc pas vraiment une!

Option 2: Fournir un billet sur une autre compagnie aérienne.

« Nous avons un système interne qui nous permet d’acheter des billets pour nos clients sur d’autres compagnies aériennes » explique Hugo Trac.

Vraiment?! C’est le paradis! Enfin sauf si les avions sont déjà pleins. LEVEL semble néanmoins avoir choisi de déployer ce dispositif pour sauver sa réputation et son début de saison.

« Devant l’ampleur de la situation, on a ouvert toutes les vannes et étudiés toutes les possibilités pour faire partir nos passagers. Que nous ayons des accords ou non avec les compagnies aériennes, nous avons utilisé leurs services. On voulait  faire partir nos passagers au plus vite »

Option 3: Annuler son voyage et obtenir un remboursement!

Option 4: Les passagers peuvent par eux-mêmes, réserver un vol et envoyer la facture à LEVEL.

Hugo Trac n’a pas été en mesure de nous indiquer les délais de traitement mais selon lui, les délais seraient raisonnables.

Les passagers peuvent se faire rembourser leurs billets s’ils ne souhaitent pas attendre le prochain vol mais les tarifs de dernières minutes sont très élevés. La compagnie pourra aussi rembourser les frais raisonnables de repas et d’hébergement . Ces réclamations pourront se faire dès le 18 juillet sur le site de Level.

QUE DIT LA LOI ?

Le journal de Montréal nous indique quoi faire en cas d’annulation de votre vol:

  • Dans le cas des vols du Canada (plus de 3500 km) vers l’Union européenne et assurés par une compagnie de l’Union européenne, les passagers ont droit de réclamer une compensation de 600 euros (925 $ CAN) si vous arrivez à destination plus de quatre heures plus tard que prévu.
  • La compagnie doit vous rembourser le billet, et vous offrir de repartir dans les meilleurs délais ou à une date ultérieure qui vous convient, dans des conditions semblables.
  • Si la compagnie décide unilatéralement de rembourser votre billet initial, vous avez droit à un remboursement supplémentaire de la différence de prix avec le nouveau billet.
  • Si la compagnie refuse de rembourser, il vous est possible aussi de vous tourner vers votre carte de crédit pour demander une rétrofacturation.

Cela pourrait mettre du beurre dans les épinards pour de prochaines vacances! Vous êtes dans cette situation difficile? Rappelez-vous qu’un agent de voyages organise et gère aussi les problèmes éventuels. Avoir quelqu’un au bout du fil, c’est tout de même mieux que de s’acharner contre un serveur vocal :) En plus, grâce au fond de prévoyance FICAV, vous êtes automatiquement pris en charge!

VERDICT DE LA RÉDACTION: LA COMPAGNIE LEVEL MÉRITE-T-ELLE UNE DEUXIÈME CHANCE?

D’après nos recherches, une zone d’ombre plane toujours sur les causes de cet incident et tout laisse à penser qu’il y a eu une négligence de la part de la compagnie. Nous accordons néanmoins un peu d’indulgence à LEVEL puisqu’il s’agît d’une nouvelle route opérée par la compagnie. Si vous saviez à quel point il est difficile de mettre en place une nouvelle liaison aérienne, vous seriez aussi un peu plus compréhensifs. Il s’agit d’une erreur de début de parcours mais cela ne signifie pas que la compagnie ne pourra pas vous offrir un bon service dans l’avenir. Devant la détermination de LEVEL a réparer son erreur, tout laisse à penser qu’un incident majeur ne risque pas d’arriver à nouveau cet été. LEVEL devra redoubler d’efforts sur le marché québécois pour sauver son image et rassurer les passagers et sans oublier de contenter les investisseurs qui ne sont en général pas adeptes du scandale. À titre personnel, j’attendrai toutefois quelques semaines avant de voyager avec la compagnie pour être certaine que les vols sont bien assurés. Même avec la meilleure volonté du monde, certains problèmes peuvent parfois ne pas se régler en un claquement de doigt. Il convient de mentionner qu’aucun autre problème similaire n’a été enregistré sur une autre route opérée par LEVEL, ce qui est plutôt rassurant.